L’aventure, initiée en 2012, se poursuivra jusqu’à l’année prochaine, en capitalisant sur les acquis de l’expérience passée. Cet accompagnement technique et institutionnel des projets déjà exécutés doit s’inscrire dans la durée.
Bientôt trois ans après l’installation de nos conseils municipaux, élus en mai 2018, au suffrage universel, libre et démocratique. Mais l’exercice du pouvoir local, tel qu’énoncé dans le chapitre 7 de la Constitution, n’est guère aussi aisé qu’on le croit. Preuve à l’appui, combien de communes ont du mal à gérer leurs affaires locales, sans sortir du giron de l’Etat central. D’où un accompagnement d’appoint de taille. Et là, l’intervention du Bureau international du travail (BIT Tunisie), vient à point nommé, dans la mesure où son «appui aux zones défavorisées (AZD)» 2012-2017 était, alors, salutaire. Et les projets de proximité qu’il avait réalisés au profit des populations locales étaient tels qu’ils ont pu transfigurer le vécu des régions bénéficiaires. L’expérience a été fort appréciée. Mais non sans difficulté.
Près de 30 MDT injectés
Aujourd’hui, son franc succès vaut bien la messe. La manière d’agir sur le terrain, en complément des dispositifs de l’Etat, avait créé une certaine dynamique communautaire inédite. Ce qui a renforcé son capital- confiance auprès des bailleurs de fonds qui n’ont point hésité à mettre le paquet. Six ans plus tard, mission dûment accomplie. Place à une nouvelle «Initiative pilote pour un développement local intégré (Ipdli)», projet qui fait, en quelque sorte, suite au programme AZD. En bénéficieront au total 12 communes, nouvelles et anciennes, dans quatre gouvernorats, à savoir Jendouba, Gafsa, Kasserine et Tataouine. Déjà lancé, ce nouveau projet 2018-2022 est géré sous la tutelle du ministère des Affaires locales et de l’Environnement via l’Instance de prospective et d’accompagnement du processus de décentralisation (Ipapd). Cela s’inscrit dans le cadre d’un partenariat avec l’Organisation internationale du travail (OIT), avec des financements européens de l’ordre de 9 millions d’euros. Soit environ 30 millions de dinars seront investis dans les régions concernées. Enveloppe jugée colossale, à plus d’un titre.
Récemment, une conférence de presse s’est tenue à Tunis pour faire la lumière sur l’état d’avancement de ce projet Ipdli-UE-OIT. Soit une évaluation à mi-parcours. Son coordinateur principal, Jad Boubaker, fait de son mieux pour réussir. L’homme, en bon animateur de groupe, semble être digne de ce second défi. L’enjeu est de taille : «On doit continuer avec le même esprit communautaire et la même volonté qui nous animent pour aller jusqu’au bout», lance-t-il. Autant dire l’aventure, initiée en 2012, se poursuivra jusqu’à l’année prochaine, en capitalisant sur les acquis de l’expérience passée. Pour lui, l’AZD demeure, alors, un modèle à suivre. Mais la réalité du terrain a son mot d’ordre, d’autant plus que chaque projet a ses propres spécificités. Y faire participer les médias, croit M. Boubaker, c’est pour être sur la même longueur d’onde et mieux penser ensemble l’avenir des régions. «Les médias sont nos partenaires stratégiques», répète-t-il.
Le sens de la décentralisation
L’Ipdli ne peut se faire que dans le cadre de la décentralisation. Président de l’Ipapd, M. Mondher Bousnina a bien défini la terminologie : «Au sens de la Constitution, la décentralisation est la délégation des compétences du centre vers la région, où la gouvernance locale se démarque du pouvoir central». Dans ce sens, l’Etat n’a plus l’apanage de la gestion communale.
Cela dit, il est dérisoire de décider de ce qu’on peut faire d’une école ou d’un dispensaire dans une région quelconque. L’on doit, ici, respecter le principe de subsidiarité, selon lequel la responsabilité revient à l’entité compétente la plus proche. District, région ou commune, la logique de proximité l’emporte. En termes de développement local, renchérit M. Boubaker, l’essentiel est de voir les communes bénéficiaires des interventions du BIT prendre leur destin en main.
Toutefois, « cette décentralisation ne s’applique pas en bloc, c’est plutôt un processus à plusieurs étapes. Elle demande du temps et de l’argent», a toujours misé l’ancien ministre des Affaires locales et de l’Environnement, Mokhtar Hammami. Expert en la matière, l’homme sait de quoi il parle. Du reste, l’Ipdli n’est qu’un instrument d’appui et d’accompagnement pour faire connaître à ces douze communes bénéficiaires le sens d’être partenaires à la prise de décision. Un citoyen local, c’est celui qui doit agir en acteur du développement principal. Que nos élus d’aujourd’hui retiennent le message!